- Incipit:
Yo ! Parlons peu, parlons bien :
L'Esquisse est un univers loufoque dans lequel des gens de chez nous ont été mystérieusement projetés. Il y a certaines constances dans l'illogisme ambiant, des éléments récurrents, des personnages emblématiques... Mais c'est globalement un joyeux bordel.
Je ne vous décrit pas encore mon personnage, vous le découvrirez plus bas !
Pour deux trois points de compréhension sur le vocabulaire : la cyance est l'étude des phénomènes en tous genres de l'Esquisse, et les « tempêtes » sont des vents improbables qui transforment et bouleversent tout sur leur passage.
Bonne lecture !
J'avance péniblement, mes pas traînant dans le sable rouge. La clarté ardente du ciel rose dépose des reflets mauves sur les dunes. Malgré la beauté certaine de ce camaïeu, je ne prends pas le temps de le comtempler. Mon pas, certes hasardeux, est déterminé. Il me faut quelqu'un, quelque chose, quelque part, mais pas... rien. Rien sinon un océan carmin.
Me revient en tête l'image et les voix de ces illuminés qui avaient parlé d'un dérèglement climatique, d'un déchaînement des éléments. Dernièrement, les rues de la ville étaient parfois parasitées d'un ou deux crieurs insupportables, de prétendus cyantifiques venus nous apporter le bon sens. « Rentrez chez vous ! » qu'ils disaient. « Protégez-vous des désastres à venir, le monde va mal ! » qu'ils disaient. Mais quand bien même certains avaient pu accorder du crédit à ces singes...
Personne n'aurait pu imaginer un changement si fulgurant. Pas même ces aboyeurs de mes deux.
Les tempêtes, nous les connaissions tous. Moins d'entre nous en avaient été témoins, et encore moins en étaient ressortis indemnes. Mais ça suffisait pour s'en faire une idée. Quant à ça... ou bien je nage dans un délire inédit, dont je me serais bien réjoui si je ne m'étais pas habitué au précédent.
Ou bien c'est un cataclysme sans précédent.
Quoi qu'il en soit, je ne peux pas rester dans cette situation, à errer nulle part. Et il semblerait que ma persévérance a été récompensée : quelques stries contrastent à l'horizon de la mer rouge. De grands turboisiers font un bosquet, là-bas.
Je me rue vers ce coin qui me sera probablement salvateur. Quand bien même la chance viendrait à manquer, je pourrai m'y abriter faute d'y trouver qui que ce soit.
Le bois est clairsemé, et à mesure que je m'en approche, je peux clairement distinguer ce qui se dessine au travers. Un bâtiment se dresse derrière les arbres.
La fatigue commençait à me gagner, et je salue la Main pour m'avoir apporté meilleur refuge que ce modeste toit feuillu. Je suis un grand mur métallique sans fenêtres, laissant traîner ma main sur la tôle cuivrée que l'oxydation irise. Arrivé à son bout, je contourne une verrière dont les vitres sablées m'empêchent de discerner l'intérieur. Enfin, je vois poindre une entrée.
Je me glisse assez peu timidement dans des lieux qui se sont maintenus éclairés tant bien que mal. De grands couloirs vides et des salles très impersonnelles m'accueillent, ces dernières remplies de papelards traitant de sujets cyantifiques en tous genres ne m'intéressant aucunement. Mon errance reprend alors, à la recherche de plus d'utilité que des piles de papiers. De l'utilité du genre de...
Du genre de ce délicat fumet que je sens d'ici-même, en fait. Je suis la trace olfactive pour rencontrer son origine, et arrive dans un grand réfectoire en bordel. Et là, au milieu, sur une table, un simple et odorant ragoût. Posé là, comme préparé et servi rien que pour moi. Une situation incongrue, si j'oublie le monde dans lequel j'évolue. Mais bon, comme toujours ici : « si tu ne peux jamais te fier aux apparences, il te reste la chance ». Je sais plus qui m'a dit ça, mais ça m'aura servi de devise autant que de leitmotiv jusque-là.
Je m'installe donc à table, m'asseyant sur un petit banc de cantine. Couverts en main, serviette sur les genoux, je m'attaque au plat.
« Bonjour voyageur ! »
Cette petite voix entêtante m'interpelle sans que je parvienne à déterminer d'où elle provient.
« Le repas est bon ?
— Je ne sais pas, je n'y ai pas encore touché.
— Eh bien mettez-vous à l'aise, profitez donc de votre assiette ! »
Cette petite voix emmerdante m'ennuie et je ne parviens toujours pas à déterminer d'où elle provient.
« Où êtes-vous ?
— Ici, pardi !
— Et qui êtes-vous ?
— Moi, pardi ! »
C'est que la discussion n'a pas eu à durer pour qu'il me les hache menu celui-là.
« Soyons amis !
— Montrez-vous, pour commencer.
— C'est que, je ne peux pas vraiment.
— Ah bah non, la moindre des politesses voudrait... »
Un bruit de freinage, ou de soupape, comme celui d'un gros camion pas bien compliqué se fait entendre depuis l'extérieur. Ça fera bien un son identifiable. Les fils se connectent : si un véhicule est là, des gens le conduisent peut-être ! J'abandonne une barbaque en sauce un peu trop salée, et file vers la sortie.
« Eh mais non, partez pas comme ça ! »
Dans ma précipitation, je ne fais pas attention au fatras ambiant et me cogne contre un grand amas de je ne sais quoi. Le bordel tombe, et s'en distingue un objet relativement volumineux. Une grande caisse, ou une boîte. Un cube en somme, décoré d'un coeur à chacune de ses faces.
Il semble n'avoir rien de cassé, sinon un petit coeur, scindé par une griffure que la chute a dû lui faire. Mince...
Barf, après tout, plus personne ne s'en souciera.
- Mon perso:
Mon perso, eh bien, c'est le Cube :
Et rien de plus. Enfin, il parle un peu, et voilà.
L'identité du narrateur par contre, j'en ai aucune idée.