Texte en écho : HARMONIE Du samedi 24 octobre (00h01) au dimanche 25 octobre (23h59)
Parfois les choses vont trop vite autour de nous. Tout change, tout bouge et le chaos débarque dans nos vies. Les idées embrouillées, on ne parvient pas toujours à réfléchir ni à prendre les bonnes décisions. Soyez en paix avec vous-même, prenez le temps de vous libérer l'esprit pour retrouver l'harmonie dans votre vie.
Votre personnage est tracassé ou vient de vivre un évènement qui l'a profondément perturbé et il a besoin de temps pour prendre du recul et se sentir mieux. Racontez-nous comment il parvient à adoucir ses pensées et à retrouver la paix intérieure.
Rappel ○ Texte en écho :
Avec une limite de 1500 mots chacun, les participants seront en binôme. La modalité particulière de cette épreuve est que leur texte doit faire écho à celui de leur partenaire. La façon de faire est assez libre, cela peut intervenir dans la forme du texte, dans un élément important qui y apparaît, dans son déroulement global... L'écho doit tout de même être assez conséquent pour être remarqué sans tomber dans la facilité (la répétition d'un mot ne suffit pas, par exemple). Vous aurez cette fois deux jours pour vous concerter et mener à bien cet exercice.
En supplément :
• Aucun ordre n'est imposé, vous choisissez qui commence ! • Vous pouvez mettre une petite explication de l'écho entre les deux textes si vous l'estimez nécessaire. • N'hésitez pas à rejoindre la ShoutBox si vous n'avez pas encore trouvé votre binôme. • Si vous ne souhaitez pas de commentaire, n'oubliez pas de le mentionner. • Les mises en forme sont autorisées, mais privilégiez la lisibilité ! • A propos de mise en forme, vous pouvez mettre un joli avatar en utilisant le code de transformation ! (Et le sujet est là pour faire des essais au préalable ! )
○ N'oubliez pas de faire une petite mise en contexte (univers / personnage) au début de votre post. (En spoiler, c'est bien.) Ainsi qu'un avertissement si vous constatez que votre post contient une certaine violence. ○
Maître de Jeu
Melkus Oldan
Invité
Melkus Oldan
Dim 25 Oct - 16:13
Présentation univers:
Le monde d'Elysion est un univers qui se compose de trois grands continents : Eaque où se retrouve la cité monumentale d'Hypnos, Minos, l'île des êtres doux et pacifiques et Rhadamanthe, la terre désertique où règne la violence. Sur ceux-ci vivent une pléiade de races aux pouvoirs curieux et variés tentant de cohabiter ensemble du Bais (lundi) au Thalès (dimanche). Mais dissimulée aux yeux de tous, une antique menace peut resurgir à tout moment.
Présentation personnage:
Melkus Oldan est un augmenté, c'est-à-dire la race qui a succédé aux humains. Physiquement, si ce n'est une taille, une espérance de vie et une force supérieures, rien ne les distingue de leurs ancêtres. Vieux pêcheur solitaire, il vit à l'écart des grandes populations, dans un petit village sur la côté ouest de Minos, où tout le monde vit d'une agriculture simple.
"Petit poisson"
Il n'y a pas assez de mots. Des dizaines de milliers mais tous insatisfaisants. Il faudrait pourtant un mot, même petit, rabougri, claudicant, myope, avec un peu de morve au nez ou ankylosé par les années. Peu m'importe sa forme, s'il me permet d'entendre de nouveau, le son de son pied qui s'extrait du drap, passe le bord du lit et fait craquer le parquet.
Elle est partie un solon. Le bateau ne vient pas le thalès, tout le monde a le droit à un jour de repos après tout. Elle est partie parce que Minos est une petite île et Hypnos est une ville-monde. Elle est partie parce que l'eau qui lèche les roches, le vent qui fait trembler les mêmes arbres et les algues qui s'entassent, ça lasse à force. Et puis là-bas, on marche aussi longtemps que l'on veut et les visages ne sont jamais les mêmes. Ici, on ne remplit que de maigres étagères avec sa collection de faciès. La liste est longue de ce que leurs « on » font et de ce que nos « on » regardent se défaire. Elle est partie parce qu'elle est jeune et que je suis vieux.
Je n'ai plus son réveil à anticiper mais il me reste les pépiements des oiseaux. La tournée prend un peu de temps, chacun doit recevoir ce qu'il y a de mieux. Il faut ce qu'il faut pour rendre les pensionnaires heureux et faire jaillir les gazouillis. Je m'occupe ensuite de leurs plumages, de leurs petites pattes, de leurs becs jaune-rose et enfin de leurs cages. Après, je peux souffler un peu. C'est le début de ma routine mais qui avance de travers. Elle n'est plus là. Je soigne donc les oiseaux plus tôt. Je suis alors rendu à moi-même en avance. Elle pesait son pied sur le plancher. Elle pesait peut-être plus encore des minutes et des heures.
Je suis sorti. Il faut installer les filets, préparer les lignes et vérifier l'écluse. J'essaie de prendre plus de temps. Je jette un regard de plus, je tâte quelques secondes supplémentaires, j'inspecte les mailles aux millimètres … On ne saisit pas le vide, qu'importe son habileté. On ne lui arrache pas ses arêtes mais on avale sa chair jusqu'à se sentir plus affamé qu'on ne l'a jamais été. Je fais des tours sur les roches de l'écluse. J'avance de plus en plus vite. Si, je suis à la limite de perdre l'équilibre, je ne peux penser plus qu'à cela. C'est un réflexe, une relique d'instinct. Je ne veux pas la voir me fixer. Je ne veux pas m'entendre lui demander d'où vient cette écorchure. Je ne veux pas sentir le poids de sa main, petit rongeur, dans ma paume, étreinte de terre, étroit terrier … qui ne la lâche pas, qui ne veut pas qu'elle trébuche. L'écluse est déserte. Je ne fais plus assez attention, plus aucun poisson ne se laisse avoir. Un léger mouvement rompt la surface.
Il est minuscule. Une zébrure sur le poil de l'eau. Un tiret orange qui glisse au bord des roches. Il pourrait sortir. Les interstices sont larges. Il reste. Est-ce un rouget de Rhadamanthe ? Une perche archipel ?
« Et toi, petit ? Pourquoi es-tu venu ici ? C'est bien loin de chez toi, damoiseau fretin. Pourquoi la marée te mène-t-elle sous mon porche ? Tu es fatigué ? Tu as filé à l'écart des tiens et te voilà tout piégé. Qu'est-ce que tu as gagné à partir ? Tu as vu quoi de beau ? Mon écluse méritait-elle tant de risques ? La jeunesse de tes écailles contre un tas de caillasse ? Réponds-moi par les dieux !
- Ploc. »
Il a sorti sa tête de l'eau. Ses yeux obliques me biaisent. Il ne bouge pas. Il frétille un peu. Il caquette des branchies ce têtard de saligauds. Il est juste en dessous de moi. Il se plonge dans mon ombre. Quand j'avance, il suit. Il s'enferme dans mon sillage et veille à ne pas quitter ses rives.
« Mais tu veux quoi ? Tu es parti, tu te débrouilles. Je m'en moque de tes bla-blaquatiques. Ah, c'est facile de brandir ta nageoire à la narine de ton père puis de dégager vers d'autres rivages. La mer, c'est la même partout. Elle est plus ou moins grande mais elle est toujours salée. Et si elle ne l'est plus, ce n'est plus la mer, et tu meurs. Comment je sais moi qu'elle est dans un bon environnement ? Tu peux me le dire, toi ?… Je suis désolé. Je m'énerve contre toi mais tu n'y es pour rien. Je ne connais rien de toi. Je vous pêche mais vos amertumes et vos vagues à l'âme, je ne peux pas dire. Ils étaient méchants avec toi ? Ta couleur ? C'est con les poissons. C'est pas beaucoup mieux les terrestres. Les autres aussi la regardaient mal. Trop de rêves, trop de choses qu'on ne sait pas traduire ici. J'avais peur qu'à force qu'ils s'accumulent, ils gonflent sa tête et qu'elle vole loin. Je lui ai pris des oiseaux. Je ne pouvais enfermer le ciel, j'ai mis les piafs dans des boîtes. Elle est partie par bateau. J'aurais dû construire plus d'écluses … On ne comprend pas tout mais elle avait la place pour ses idées. Elles avaient les arbres pour tendre les hamacs, la plage pour les serviettes, les grottes pour les plus discrètes, un taillis d'herbes sèches pour les frileuses … Là-bas, ils sont les uns sur les autres. La ville est une grosse pieuvre, tu vois ? Elle saisit les gens comme des grappes de palourdes qu'elle entasse en colonne. Ses pensées vont s'étouffer. Elle a besoin de s'agiter, de liberté. C'est comme toi. Tu es un voyageur et ce petit creux d'eau … C'est pas assez et ce le sera jamais. »
Le poisson est là depuis plusieurs jours. C'est un nouveau pensionnaire. Un peu sans-gêne mais il sait se faire apprécier. Son marivaudage est bien étudié. Un ploc bien senti, un gloup élégant entre deux rations. Il grossit peu à peu. Ce n'est pas passé loin, il était affaibli. J'ai dû le badigeonner d'onguent. Il a déjà oublié tout cela.
« Bientôt, tu seras trop gros pour quitter l'écluse. Tu le sais ça ? Il ne faudra pas pleurer. »
Ma prédiction se réalise plus vite que je ne l'imagine. Il ne peut plus s'enfuir. Pourtant, il ne frappe pas son corps contre les parois. Il attend à l'entrée. Assis sur celle-ci, le soleil dans les yeux, je ferme un œil et reporte l'autre, comme un geôlier cyclope, sur lui.
« Je t'ai soigné. Sans moi, tu serais mort. Tu veux t'en aller. Tu es un ingrat, poisson. Pourquoi dois-je faire tous ces efforts si à la fin tu n'es pas à moi ? Le creux est petit ? Pourquoi es-tu devenu grand alors ? Ce n'était pas plus simple de rester petit ? Je suis déjà grand, moi. Tu n'avais pas besoin de l'être à ton tour… »
Un concert de piaillements éclate. Je me précipite vers la maison. Les oiseaux remuent leurs cages avec plus de vigueur que d'habitude. Les pointes de leurs ailes se blessent sur les tiges d'osier. La scène me parait grotesque. De si grands êtres, dans de toutes petites pièces. L'orage menace, un quadrillage de fumerolles électriques cloisonne les alentours. Dans un éclair spontané qui ne m'avait plus effleuré, j'offre toutes les clefs du royaume. Le vieux gardien se fait freluquet vandale. Ils partent tous, écaillés et duveteux. La pluie tombe. Et j'espère qu'où que tu sois, mes erreurs ne te pleurent pas dessus.
Le lendemain, la forêt a pris froid et éternue. Une petite mouchure blanche est soufflée de son pavillon. Coincée dans la moustache des roseaux, elle peine à se dépêtrer de toutes ces tiges. C'est une chouette. Son aile est brisée et ses plumes gorgées de gouttes. Je lui fais un lit de bébé, un nid sans barreaux. Et au milieu des soins, je lui murmure, en de susurrés hululements :
« Je vais m'occuper de toi. Quand tu seras forte, tu pourras sortir comme tu le chantes. Puis viendra un temps, où il faudra que tu t'en ailles. Je ne te mettrai pas à la porte mais ce sera comme ça. Depuis toujours comme le pied avant devant le pied arrière. Mais pour le moment, tu ne connais rien. Tu es plus bête que la pluie qui n'est pourtant pas très maline. Mon cervelet d'oisillon, tu vas rester un peu, hein ? Et puis, il faudra que tu écoutes quand je te la décrirai, pour que toi ou un de tes amis me donnent de ses nouvelles. On doit laisser les enfants grandir, tu sais, mais il est difficile de ne plus entendre, ceux qui ont mis tant de lumières dans nos oreilles et de rires dans nos yeux. »
1490 mots
Melkus Oldan
Marissa E. Iselk
Invité
Marissa E. Iselk
Dim 25 Oct - 22:39
Madelle:
Ce monde est né à partir d'un arbre et du chaos qui l'entourait. Les peuples se sont élevés au coeur même des éléments. Les Héléos dans l'eau, les Liares du feu et les Humains de la terre. Il n'existait que la Vérité de la déesse Mère jusqu'à ce qu'un humain en particulier la brava.
Ce mage sembla sage en son temps à vouloir réunifier son peuple, mais aujourd'hui, il est dépeint comme le pire cauchemar de Madelle. Aujourd'hui, sa confrérie Récleyès est de retour, et avec elle, la prophétie de l'élu deviendra réelle aux yeux de tous.
Marissa Ellyn Iselk:
Elle fait partie de la confrérie humaine des Arvèles. Ils ont une culture très militaire, car maîtrise une magie (ou Vérité comme on l'appelle chez nous) liée au métal et plus spécifiquement aux armes. Elle a vécu enfant avec son père qui était forgeron. Comme tous les jeunes de sa confrérie elle a été à l'école militaire, mais n'a pas souhaité intégrer l'armé.
À la place elle est partie dans le pays du feu qui est juste à côté de chez elle pour rencontrer le peuple du feu les liares. Après avoir bien baroudé, elle est rentrée à la forge pour aider son père vieillissant. Jusqu'à ce que le village se fasse attaquer par un dragon. Son père est mort dans l'attaque. Elle l'a vengé avec plusieurs survivants. Ils ont traqué la bête jusqu'à sa tanière et l'on tué.
Marissa est ressorti avec l'œuf en sa possession et l'intention de le vendre pour reconstruire la forge de son père, mais elle va se retrouver dans de multiples rixes à la capitale. Préférant donner quelques coups et crier un peu fort plutôt que de réellement vendre cet œuf.
ps : sa magie lui permet à l'époque de faire apparaître des petites lames qu'elle doit jeter à la main et très rarement une épée longue. Et elle porte toujours sur elle une rapière forgée avec son père et le fouet de sa mère.
Harmonie
En Kahl 1247 à Ferèsis dans les montagnes de saphir
Cling. Cling. Cling.
Embarquée dans une danse afutée, Marissa est au milieu de deux hommes brandissant leurs armes. Tous les trois tournent en rythme, les armes s'entremêlant et repoussant leurs adversaires. L'un d'eux arrive à pousser Marissa qui tombe sous leurs armes en mouvement. Elle se sert de sa rapière comme d'une canne pour ne pas tomber face contre terre. Une roulade en avant et un coup de pied dans la cheville de l'un de ses assaillants lorsqu'elle se relève lui évite d'être transpercée par l'une des lames.
Un regard désespéré vers sa besace attire l'attention des voleurs qui l'avaient presque oublié, entraînés dans cette ronde infernale. Ellyn leur barre le chemin, mais l'un d'eux fonce vers elle. L'autre l'attaque dans le dos tandis que la guerrière le repousse sur le côté, matérialisant une de ses fines lames et la lui jetant en pleine face. Le bas de sa cape est découpée et son haut tranché par le coup de l'autre voleur, mais c'est à peine si son dos est entaillé. Marissa se retrouve au milieu d'eux, le sac face à elle dans le coin de l'allée sombre où ils l'ont coincé quelques minutes plus tôt.
Elle sort son fouet de cuir et les tient à distance.
Clac. Clac.
Sa rapière toujours brandit vers eux, le fouet claque à leurs pieds. Tous les trois ont besoin de reprendre leur souffle, ce sera à celui qui sera le plus rapide. L'un des voleurs attaque, emporté par sa large épée courbée, il tourne sur lui-même dans un geste fluide, mais passe devant Ellyn qui a fait un pas en arrière tout en jetant sa poitrine et son cou en arrière juste à temps pour ne pas se prendre le fil de la lame. L'autre voleur lui n'a d'yeux que pour la besace qui renferme l'oeuf de dragon. C'est à peine s'il a le temps de le prendre en mains.
Il est tiré en arrière d'un geste suffisamment sec pour lui faire plier le genou. Marissa arrive à récupérer son bien, mais la revoilà au milieu des voleurs :
- Abandonne ! Je suis prêt à faire une trêve quelques minutes avec vous, on verra ensuite comment se partager le butin ?
L'autre voleur tire une sale gueule et ne décroche pas un mot. Clairement il n'a pas l'air de vouloir être raisonnable et de lui pardonner d'avoir ruiné sa cape. L'œuf encombre Marissa, même s'il n'est pas très lourd il ne tient pas en place dans son dos et il se prend régulièrement des coups de coudes alors qu'elle fouette le vent de son fouet. Les voleurs restent à distance, la jeune femme commence à faire quelques pas pour se rapprocher de la rue principale. Personne là-bas ne fait attention à eux, prit dans leur routine c'était comme s'ils ne les voyaient pas.
L'homme à la demi-cape devient plus agressif, sentant son butin s'envoler. Les deux voleurs se ruèrent sur Ellyn qui détala dans les rues de Ferèsis. À peine quelques mètres plus loin, ils aperçurent des gardes de la ville et chacun se mêla à la foule. Marissa entra dans un petit salon de thé transpirante et haletante. Le réceptionniste à l'entrée ne réprima pas sa grimace de dégoût. Il vient toutefois vers elle et lui indiqua une table aussi professionnellement que possible. Elle avait encore sa rapière en main et il était à deux doigts de sortir pour appeler la milice.
En se rendant compte de quoi elle avait l'air, Marissa la rangea rapidement :
- Ow pardon ! J'ai vu un rat dans la rue et j'ai paniqué. On a tous nos phobies vous savez.
Dubitatif, il lui demanda :
- Vous souhaitez prendre quelque chose pour calmer vos frayeurs ?
Les voleurs étaient sûrement dans le coin. Ellyn décida de rester. Nerveuse la première demi-heure, elle avait gardé sa besace sur ses genoux malgré les fourmis qui grimpaient le long de ses jambes et engourdissaient ses talons. Quand un serveur revient vers elle pour débarasser la table, elle eut un geste brusque à son égard et il aurait détalé si elle ne lui avait pas redemandé un thé.
Son esprit se calma à chaque gorgée jusqu'à ce que ses pensées noires resurgissent. Elle laissa échapper un petit rire ettoufé en pensant à ce que son père aurait dit s'il l'avait trouvé là, mais ses lèvres s'affaissèrent et elle balaya bien vite cette pensée, son souvenir encore trop douleureux. Elle posa enfin sa besace à ses pieds, cet œuf de dragon qu'elle avait subtilisé dans l'espoir de reconstruire la forge de son père, l'endroit où elle avait passé toute son enfance. Elle n'avait vraiment pas envie d'y penser !
Trouver un acquéreur pour l'oeuf avait été plus compliqué qu'elle ne se l'était imaginée. À dire à qui voulait bien l'entendre ce qu'elle transportait elle avait fini par attirer bien trop d'avidité autour d'elle. Cela faisait plusieurs jours qu'elle avait brisé sa routine et se contentait de dilapider le peu d'argent qu'elle avait de côté. Pourtant les gens malintentionnés continuaient de l'aborder. Elle finit par rentrer dans la taverne où elle séjournait. Ces jours-ci, si elle n'était pas en train d'échapper à quelqu'un ou de se battre, elle se trouvait dans cet endroit à boire alégrement et se faire des amis d'un soir.
Cette nuit là Ellyn était un peu taciturne. Elle avait gardé sur elle sa besace et s'était installée à une table très loin de la scène où un chanteur accompagné d'un violionniste régalait la salle de leur musique. Tard dans la soirée, une vieille à la chevelure poivre-sel s'approcha de sa table et y jeta une lourde bourse dont les pièces tintèrent avant de s'asseoir :
- J'ai entendu parler de votre précieux chargement, ça devrait suffir ?
Marissa s'enfonça dans sa chaise, agacée par l'intrusion de cette femme, mais elle ne pouvait pas ignorer la somme qu'elle venait de déposer devant elle. Ses mains lâchèrent sa besace pour renverser la bourse. Les pièces brillaient sous la lumière des bougies de l'établissement, même dans ce coin reculé elles étincelaient. La guerrière n'avait jamais vu autant d'argent, il y avait là bien assez pour reconstruire la forge, la maisonnette et même une partie des bâtiments du village... même s'il n'y avait plus personne...
La jeune femme se releva brusquement :
- Dégagez ! Vous croyez que c'est un prix raisonnable ??? Jamais je ne céderais l'œuf pour un prix si dérisoire ! Personne ici n'est capable de m'en offrir le juste prix, vous pouvez dire à tous vos amis que nous serons partis d'ici demain !
Le violionniste écorcha quelques notes, mais le spectacle continua. Ellyn laissa en plan la femme et monta s'enfermer dans sa chambre. Elle passa la nuit avec l'oeuf. Son sommeil fut agité. Elle vit son père aux côtés du dieu de la mort Uraang sous sa forme d'âme. L'oiseau translucide était d'un vert émeraude signifiant qu'il devrait passer une décennie dans le royaume d'Uraang pour expier ses péchés. Aucun son ne sortit de la bouche de Marissa alors qu'elle criait le prénom de son père. Jack quant à lui vola vers elle et se posa sur sa main tendue vers lui.
Marissa se réveilla alors que son père déposait un baiser sur front.
Elle était en sueurs et en larmes. La lune illuminait sa chambre. Debout à la regarder, elle s'imagina à la plage des astres pour nager dans son reflet et rejoindre son père. Mais en se retournant et en voyant l'oeuf dans son lit, elle prit la décision de reprendre son voyage dans le pays du feu. Là-bas elle pourrait peut-être en apprendre plus sur lui, Elle ne pouvait plus rester ici, il n'y avait plus rien pour elle. Reconstruire la forge n'y changerait rien. Elle ne pouvait plus compter que sur elle désormais.
Elle se glissa dans les draps humides et serra l'oeuf contre elle. Cet être qu'elle avait détesté si ardemment en le trouvant était aujourd'hui sa seule raison de vivre, mais au moins elle en avait trouvé une.
Au petit matin, la ville était envahie par le brouillard. Ellyn s'éclipsa. Elle ne chercha à provoquer personne et s'en alla sans regret de la ville. À la sortie elle fut tétanisée. À gauche, le chemin redescendaient vers les plaines où se trouvait son village. À droite il s'enfonçait dans la montagne et vers le pays du feu. Dans un murmure, elle prit sa décision. Regardant le sentier à sa gauche, elle dit à l'intention de son père :
- Au revoir papa.
Elle s'enfonça dans la montagne, tournant le dos à la civilisation et aux tentations qui lui avaient fait perdre de vue ce qui l'avait toujours animé. L'envie de voyager et de se confronter aux autres peuples. Elle n'avait jamais voulu s'enfoncer dans la violence de son peuple et aujourd'hui elle avait bien l'intention de retrouver la petite étincelle qui lui avait donné le courage de partir de la forge de son père quand elle n'était encore qu'une adolescente.